Shanghai c'est l'Histoire de la Chine, Shanghai sent le voyage. Les petits commerçants, l'hôtel de Malraux et Kessel, la bourse au mariage de Shanghai, Pudong, le jardin Yu
Samedi 12 mai 2012Après un au revoir à Céline et à la femme de ménage d'Estelle, je voyage sans encombres jusqu'à Shanghai, où j'ai séjourné en 2009. L'arrivée et le trajet en taxi, de l'aéroport jusqu'au Bund est de nouveau impressionnant. De nouveau Shanghai me saisit.
A côté de Shanghai, Chongqing n'est rien. A Shanghai, les gratte ciel sont trois fois plus larges, trois fois plus hauts, et chacun répond à une recherche esthétique. Chongqing est une ville champignon, n'a pas d'histoire, c'est le présent instantané de la Chine. Shanghai a une histoire, c'est même l'histoire de la Chine conjuguée au passé, au présent et au futur. Les bâtiments signent les périodes par leur style, XIX°, art déco d'entre les deux guerres, années 90, XXI° siècle. Les Chinois de toutes les provinces viennent visiter Shanghai, symbole de la réussite de la Chine dans le monde, c'est le modèle à suivre pour tous les jeunes de l'Empire du Milieu d'aujourd'hui. Shanghai a une âme trépidante, qui bouillonne, Shanghai sent l'air marin, c'est la vibration du voyage sur la peau.
Mais ici encore, les extrêmes se côtoient. A une encablure des plus hauts gratte ciel du monde, abritant les hôtels les plus luxueux du monde, si on ne marche pas à pied, on ne voit pas pas les "litong", habitations minuscules, sans étage, encore très nombreuses, où une famille vit dans deux pièces, avec un bassin à l'extérieur comme seul point d'eau. Les logements s'alignent d'un côté, les bassins de l'autre, toute la vie se passe entre les deux, sous le linge de la dernière lessive.
Dimanche 13/05Ce matin, vers 9 heures, sur le trottoir, les commerçants sortent de leur boutique-logement, encore en pyjama, l'un pour faire sa toilette, l'autre pour se coiffer, un autre pour prendre son petit déjeuner, une autre pour étaler la marchandise à même le sol. Devant la vitrine de l'échoppe,ici une petite fille coiffe sa poupée, là une jeune mère donne le sein, là-bas une autre change son bébé.
Je marche un peu dans le quartier Hongkou, au nord du Bung et découvre des rues entières d'immeubles 1920, à un étage, de bâtiments 1930, d'autres de style anglais, en brique. Puis, vers le sud, je gagne Nanjing Donglu, les Champs Elysées de Shanghai, conçus par un français. C'est noir de monde.
Comme tous les dimanches, dans le jardin du MOCA, c'est la bourse au mariage. Elle est cinq fois plus grande qu'en 2009 ! Dans le parc du Musée d'art contemporain (MOCA, fermé à ma grande déception pour cause d'installation d'une nouvelle exposition), je discute un bon moment avec trois étudiants de Harbin, une ville du nord, à la frontière de la Russie.
Après avoir déjeuné dans un buibui pour ouvriers des chantiers voisins, je rentre à l'hôtel pour ma sieste quotidienne (je suis très ritualisé, dixit ma fille Mathilde). Comme en 2009 avec Marie, je suis descendu au "Astor House Hotel". Construit en 1846, il est classé monument historique, fut restauré en 1907, avec mobilier d'époque, en acajou. Il reçut Joseph Kessel puis Malraux, qui le site plusieurs fois dans "La condition humaine", Einstein, et aussi Charlie Chaplin (dont on peut voir quelques films). D'après le Routard "il reste d'un bon rapport qualité-prix-emplacement". En effet il est situé à l'extrémité Nord du Bund, à 50 m du pont métallique du XIX°, d'où la vue sur Pudong est exceptionnelle. Grâce à cette situation privilégiée, je peux tout faire à pied, comme à mon habitude, et voir l'autre face de la monnaie dorée. Ayant réservé ma chambre par internet fin janvier pour mai, j'ai bénéficié d'une réduction intéressante. Attention il vaut mieux ne pas y manger ni prendre son petit déjeuner, c'est très cher.
Après la sieste, sous la pluie je vais visiter le jardin Yu, un des plus beaux de Chine. Il fut dessiné vers 1570, C'est une succession de jardins très élaborés au point de reproduire la nature et permettre aux lettrés de s'échapper des contraintes des responsabilités sociales. On y trouve de nombreuses "pierres de rêve" destinées à la méditation. Pour certaines il faut plusieurs heures avant de découvrir les scènes qu'elles décrivent (animaux en action). On peut passer aussi des heures à regarder les poissons de toutes couleurs évoluer harmonieusement. Le musée Guimet a ouvert une exposition sur les "pierres de rêves des lettrés".
Voir, Mon journal de voyage en Chine (26)