《嫦娥》邹鹏"Sauna on Moon", film chinois de Zou Peng, sur la prostitution (2011)

En Chine la prostitution est interdite, on n'a pas le droit d'en parler, et pourtant elle prolifère, à tous les niveaux de la société, elle est visible aussi dans les villes où salons de coiffure et salons de massage sont ses vitrines, ses causes sont plurielles

Malgré la fiction, c'est presque un documentaire sur l'industrie du sexe, que nous propose Zou Peng. Avec "Sauna on Moon", nous sommes bien loin de "Les fleurs de Shanghai", (1998), de Hou Hsiao-hsien, qui montrait un univers de luxe, la somptuosité miniature des décors, le raffinement des objets et des tissus. Et pourtant on sent ici aussi le poids du milieu clos de l'asservissement, des chambrettes sordides, avec ses lois d'une violence parfois extrême. C'est toute l'ambiguïté et l'ambivalence du film : la photographie du talentueux Yu Lik Wai, chef opérateur sur quasiment tous les films de Jia Zhangke , enveloppe les corps du halo de douceur d'une lumière saturée. Alors, ils échappent à la marchandisation brutale à laquelle on les soumet, pour retrouver tout leur mystère. L'auteur les regarde avec une certaine tendresse, une grande humanité. La vie communautaire est presque familiale, faite de taquineries et de solidarité. Par ailleurs, le réalisateur abandonne tout schéma narratif et procède par tableaux successifs. Chaque femme est un destin particulier, cherchant à survivre dans une Chine frappée par la crise économique mondiale.

Malgré la beauté de l'oeuvre, l'ennui gagne parfois, mais on est touché aussi, parfois. Dans cet univers d'une grande violence sournoise, les désillusions et la solitude de chacune des jeunes femmes provoque aussi tristesse et révolte.