 | Le Forum Chine et francophonie, à l'écoute des francophones de tous les horizons, a rencontré récemment à Pékin Freddy Mulumba, directeur du quotidien indépendant congolais « Le Potentiel », écrit en français, et de la radio et télévision TV7 (1). C'est un ambassadeur de la presse francophone que nous avons interviewé.
Petit rappel historique, en introduction
Le Congo Brazzaville est la République populaire du Congo et le Congo Kinshasa, la République démocratique du Congo (RDC) ou Zaïre.
Le Congo Kinshasa est une ancienne colonie belge qui a été créée en 1885. C'est un Etat indépendant depuis 1960. Une population d'environ 70 millions d’habitants pour une superficie de près de 2 345 000 km2. Avec plus de 350 ethnies, la langue officielle est le français et quatre langues nationales : le lingala, le kikongo, le tshiluba et le swahili. |
Qu'est-ce qui vous amène en Chine, Freddy ?Je suis là en tant que responsable, président délégué de la section de l'Union de la presse francophone Congo Kinshasa. Dans le cadre des relations avec la Chine, plusieurs journalistes de pays francophones ont été invités par le Gouvernement chinois pour participer à un séminaire afin de mieux comprendre comment les médias chinois fonctionnent, comment ils traitent l’information, etc.
Que retirez-vous, principalement, de ce voyage ?C'est mon troisième voyage en Chine, mais les premiers voyages il faut le dire, n’ont pas été faciles. On était des francophones, mais seule la langue anglaise était utilisée, et heureusement que dans notre groupe il y avait un collègue qui faisait la traduction de l'anglais au français. Cette fois, pour ce troisième voyage, j'ai trouvé qu'il y avait un grand progrès parce qu'aujourd'hui plusieurs Chinois parlent un français correct pour assurer l'interprétariat.
Je pense qu'il y a une évolution en Chine, qui prouve que ce pays accorde de plus en plus d'importance à la francophonie. Auparavant, on était quelque peu négligés. Aujourd'hui, on est fier de parler ici le français sans problème.
A propos des liens entre le Congo Brazzaville et la Belgique, là aussi un rappel s'impose.
La Belgique est notre ancienne métropole et nous avons gardé de nombreuses relations avec les Belges. Personnellement, j'ai fait mes études de sciences politiques à Mons, en Belgique.
Dernièrement, (c'était à l'occasion de la célébration du cinquantenaire de l'indépendance de la République démocratique du Congo), quand le roi Albert II est arrivé à Kinshasa, le journal « Le Soir » qui est un grand quotidien belge, a collaboré avec Le Potentiel : on a travaillé ensemble et publié plusieurs articles.
Quelques mots sur votre journal« Le Potentiel » , qui a maintenant 30 ans d'existence, est écrit entièrement en français. C'est un quotidien qui sort six fois par semaine, (du lundi au samedi). Nous ciblons l'élite politique, religieuse et intellectuelle..
Nous avons un tirage de 5000 exemplaires par jour, (peut-être pour Kinshasa 1000 exemplaires) mais il faut reconnaitre qu'un seul journal peut être lu par au moins 20 personnes. C'est ça l'Afrique, c'est pas comme ici où chacun achète son propre journal. Le journal a aussi son site internet :
http://www.lepotentiel.comComment se traduisent les relations de votre pays avec la Chine ?On écrit beaucoup sur la Chine, car il faut dire que nous avons un contrat avec elle. La Chine a signé avec l'Etat congolais un contrat de près de 6 milliards de dollars pour l'échange de matières premières.
La Chine est très présente, car il faut dire que nous sortons d'une guerre civile. Le Congo est en pleine reconstruction et la Chine nous a aidés, pour financer, en priorité, la construction de routes, d'hôpitaux et d'écoles...
La culture chinoise commence à être présente: un Institut Confucius va se mettre en place pour que les Congolais apprennent le chinois. Mais ce n'est pas facile, parce que, en ce qui concerne notre système éducatif, il faut tout repenser et il y a le français, l'anglais et d'autres langues.
Pour le moment les affaires entre la Chine et le Congo sont plus économiques que culturelles. Mais c'est vrai, je pense qu'il faudrait plus faire découvrir la Chine aux Congolais. La pensée occidentale, la pensée africaine et chinoise sont bien sûr très différentes. Quand un nouveau partenaire économique arrive, il faut d'abord apprendre à le connaître, pour savoir faire des affaires, savoir comment se parler et aussi découvrir la philosophie chinoise.
La langue française, à votre avis, continue donc à jouer son rôle et est prise en considération par votre partenaire chinois, même si des progrès restent à faire...Je pense que le contrat avec la Chine est très positif, la Chine a fait un progrès en acceptant notamment la langue française. Notre langue officielle est le français, on peut avoir des difficultés pour bien comprendre l'anglais. Maintenant, on fait directement la traduction du chinois au français, cela nous met dans un confort d'écoute.
Je pense que dans le cadre de toutes les nouvelles coopérations qui arrivent, la Chine a intérêt, pour tous les pays francophones, à mettre un peu plus l'accent sur le français. Pour leur part, les pays francophones ont intérêt à apprendre la langue chinoise pour qu’il y ait une ouverture. Et je lance un vibrant appel à l'Organisation Internationale de la Francophonie pour mettre les moyens là-dessus. la Chine a près d’1,5 milliard d'habitants, et si nous avons 500 millions de francophones, ce serait une bonne chose pour notre communauté, notre culture francophone et notre langue.
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(1) La radio émet en français et en lingala, dans un rayon couvrant Kinshasa et le Congo Brazzaville. 
