Dans Arts et Lettres, j'ai déjà consacré une chronique à Chen, à propos de ses albums pour enfants, de vrais chefs-d'oeuvre. Il a eu la gentillesse de me recevoir dans son atelier parisien.
Pouvez-vous vous présenter et nous dire comment vous êtes venu en France ?Je suis né à Tianjin, près de Pékin. J'ai suivi toute la formation artistique aux Beaux-Arts à Pékin de 1984-1987, c'est à dire l'étude de toutes les techniques artistiques, graphiques, sculpture, calligraphie, gravure etc…, c'est la formation de base en Chine.
En 1987, je suis venu en France dans le but de poursuivre mes études aux Beaux-Arts de Paris.
"Enfant adopté"de la France, c'est ici que je trouverai mon épanouissement artistique et personnel, parce que pour moi ce pays représente le fondement de la culture, je le défends à travers la monde avec beaucoup de fierté, chaque fois quand je parle devant les enfants à l'étranger.
Je suis ému car c'est la France qui m'a accueilli à bras ouverts, nourri de sa culture et c'est grâce à elle que je deviens ce que je suis aujourd'hui.
Mais surtout ce pays incarne la liberté, qui n'a pas de prix, qui seule donne la possibilité d'être soi-même.
Ici, je sens que je peux vivre en accord avec les valeurs qui me correspondent : la nationalité, la couleur de peau, ne sont pas importantes, ce qui importe c'est de partager les mêmes valeurs universelles. Apprendre la différence en quittant son pays, c'est aussi apprendre la tolérance. Quand on a reçu cette faculté de vivre ces valeurs en toute liberté, on a le devoir de le rendre.
Chen Jian Hong / Crédit Photo Walter Landolt
Comment êtes-vous arrivé à créer des albums pour enfants ?C'est par hasard, on est venu me chercher, mais ce n'est pas non plus par hasard, car cela correspond aussi à ce que je suis.
Ce n'est pas toute mon activité mais je l'aime, c'est la transmission, laisser quelque chose, et particulièrement cette question : "c'est quoi la civilisation humaine" ? La culture n'est pas un concept, c'est la vie, je suis, nous sommes citoyens du monde, il nous faut voir les luttes d'aujourd'hui à la dimension de la terre.
C'est le cas de la culture chinoise, j'ai le devoir de la transmettre aux enfants, avec précision, d'une voix juste, sans propagande ni exotisme, en faisant le lien avec ce qui est le plus profond chez la personne humaine, pour qu'ils puissent grandir avec ces notions.
Ce qui me convient aussi c'est la fantaisie, l'imagination utilisée et nécessaire pour s'adresser aux enfants. Par eux nous sommes rassemblés, nous nous retrouvons pour vivre ensemble vers un monde meilleur. Je, on peut rendre les valeurs humaines plus vivantes, plus accessibles aux enfants, plus solides. C'est "ma mission".
Quels sont vos projets actuels, et les plus chers ?D'autres livres pour enfants bien sûr.
Mais aussi le théâtre, un spectacle à l'Opéra Comique en avril, "Les Contes Chinois". Une narratrice dira les contes que j'illustre en direct, sur scène, complété par la vidéo. C'est pour moi une autre dimension de la peinture, peindre en direct devant des spectateurs, demande une tension, une énergie qui m'excite, je me sens vivre pleinement. On se sent vivant et en même temps illusoire.
C'est une chance formidable, contrairement à l'acteur qui doit être un autre, j'incarne moi-même.
Chen sur scèneLes albums pour enfants de Chen