Billet de Paris

Alain Peyrefitte (1) écrit qu’« Il n’arrive pas fréquemment qu’on puisse dire : "Si je n’avais pas vu cela, je ne l’aurais pas cru". Cette impression, on l’éprouve en Chine ; elle incite à témoigner ». Mais voilà “qu’étonnamment”, à mon retour à Paris il y a maintenant bien un an, je me trouve dans cette même posture : si je n’étais pas partie et revenue, je ne l’aurais jamais vu, vécu et cru ; je ne serais jamais à narrer ce qui suivra.

Eh oui, certains, plus anciens, semblent avoir mieux compris le processus. Par exemple Tchouang-tseu dit : « Il est impossible de parler de la mer à la grenouille qui habite dans un puits ; elle vit dans un espace trop limité. Il est impossible de parler de la glace à l’insecte qui ne vit qu’en été ; sa durée est trop limitée. […] Ce que l’homme sait n’égale pas ce qu’il ignore ». Et fin 17e, 18e siècle nous avons eu moult « témoignages » dans un genre Guide Bleue (Misson, Montesquieu etc.) accouplés souvent à la pratique, en parallèle, de s’extraire de son propre pays, afin de… moins tendrement rapporter ce qu’il s’y passait (Fougeret de Monbron). Alors soudain, me sentant quelque peu 18e (post-moderne in fine ?)…

Mais cessons de tergiverser. Alors, une fois de retour à Paris en 2011…
De là où j’habitais un trois pièces meublé avec que des assiettes creuses à Beijing, je me trouve à sous louer un minuscule studio, dans un immeuble parisien, studio dont certes la salle de bains est munie de robinets plaqués or, mais studio équipé que d’assiettes extra plates. Puis pas un wok ! Que des casseroles ! Impossible de se faire cuire un poisson ou de griller un steak ! Puis des outils pour se mijoter des crèmes anglaises certes, mais pas un couteau ; heureusement je me suis souvenue de revenir en France avec un couteau acheté lors d’une excursion en Corée du Sud… Ma pauvre cuisinière de Beijing si elle était là, elle n’aurait jamais, jamais pu cuisiner ! Même moi j’ai un mal fou… évidemment ! Qu’attendre d’un sombre sous-sol appartenant à une parisienne d’origine anglaise ? Parce que c’est tout ce que j’ai trouvé à sous-louer via internet pour mon retour à Paris : un sous sol aux robinets en or au joli prix de 900 euros/mois.

Qui voudra en savoir plus long n’a qu’à prêter l’oreille aux explications du prochain billet.


(1)Quand la Chine s’éveillera, le monde tremblera